Brouillard.
Une silhouette se peint dans l’obscurité ternie d’un léger voile blanc : la maison d’un villageois, coupé de tous, pêcheur renommé de toute la région, c’est-à-dire des trois autres villages.
Il est tard, je ferme mon livre et regarde par la fenêtre de ma chambre. Les murs sont muets, eux qui d’habitude sont plein d’échos de prières, de chants d’oiseaux et de voix de visiteurs, tous plus bavards les uns que les autres, et ce, malgré les écriteaux qui se sont agrafés aux murs depuis quelques mois et qui indiquent :
Monastère Rokujin
Veuillez rester silencieux dans ces quartiers
Merci
La Lune semble arriver à percer le ciel, régnant au dessus de ce voile, souveraine, les effrayant même.
Je pense à ce que je viens de lire, comme à mon habitude. Ce jeune héro pris de folie et qui tente de mettre le feu à un temple. Je récapitule tout, passage après passage. Finalement une idée me vient : m’identifier à lui. Comme lui je vis dans un temple. Comme lui la reconnaissance des autres n’a aucun intérêt pour moi. Comme lui je me sens délaissé car supérieur. Je sens alors la chaleur des flammes envahir mon corps. Comme lui je laisse propager le feu, et comme lui, je me décide d’aller contempler l’acte du haut de la colline.
Il fait nuit et, même si la blancheur de l’humidité efface la route devant et derrière moi, je parviens à sortir du temple. Les nattes, au contact de la peau nue des pieds semblent vouloir arrêter mon escale, me dire de ne pas sortir, sous peine de réprimandes.